Il y a deux ans, mes professeurs d’université tentaient (vainement) de me diriger vers l’enseignement. Mais ayant une mère professeur, je connaissais bien l’envers du décors : préparations de cours, corrections, rencontres avec les parents, soutien scolaire et aides personnalisées, bref des journées qui n’en finissent pas pour un salaire bien insuffisant. Malgré tout, pour ne pas rester bloquée sur une opinion négative, j’ai tout de même tenté une expérience dans l’éducation nationale avec un petit stage qui devait aboutir sur la création d’un cours que je donnerai aux secondes de mon ancien lycée (cours dont je vous ai résumé l’essence dans un article au début du blog).
Ce cours portait sur les arts et les artistes de la Renaissance. A cette occasion, j’avais présenté l’impact de la redécouverte de l’antiquité dans la création artistique. C’est donc tout naturellement que j’y évoquait le groupe sculpté du Laocoon. J’avais pris un grand plaisir à présenter le mythe à mes élèves et je me suis dit que vous aussi, vous pourriez apprécier ce mythe à travers ce nouvel “Une oeuvre, une histoire”.

La mort du Laocoon
Le mythe du Laocoon trouve ses racines dans la guerre de Troie. Le conflit a pour origine le prince troyen Pâris qui, lors d’une ambassade à Sparte, tombe amoureux de la reine Hélène et décide de l’enlever à son mari Ménélas et de la ramener à Troie (niveau diplomatie, on a déjà vu mieux…). Ménélas, fou de rage, décide de lever une armée pour ramener sa femme et laver son honneur. Rapidement, une coalition se forme derrière le frère du roi de Sparte, Agamemnon. Une guerre de siège débute donc aux pieds de la muraille de Troie sans qu’aucun des belligérants ne réussisse à prendre le dessus.
Après dix années de conflit, les Grecs décident d’adopter une nouvelle stratégie pour vaincre les Troyens. Sous les conseils d’Ulysse, ils optent pour la ruse. Pour cela, ils entreprennent la construction d’un colossal cheval de bois. Ce dernier possède une cavité à l’intérieur de laquelle peuvent se glisser quelques individus. Après cela, les Grecs détruisent leurs campements et éloignent leurs navires des côtes, laissant sur la plage le mystérieux cheval de bois.
Les Troyens pensent ainsi que les Grecs ont abandonné le siège et qu’ils ont gagné la guerre. Cependant, ils ne savent pas quoi faire de l’immense cheval laissé par les Grecs. En effet, les Troyens ne savent pas comment l’interpréter : est-ce un cadeau de la part des Grecs ? Une offrande pour les dieux ? Ou bien un piège ? Rapidement, des débats sont organisés pour savoir quel sort réserver au cheval. Deux voix s’élèvent alors en faveur de la destruction du cheval, Cassandre, prophétesse marginalisée et fille du roi de Troie, et le prêtre de Poséidon, Laocoon. Poséidon, souhaitant voir les Grecs vaincre les Troyens, décide d’envoyer un message clair à ces derniers.
Lors d’un débat, deux serpents sortent de la mer et attrappent le prêtre Laocoon ainsi que ses deux fils. Les serpents se saisissent d’eux et les amènent au loin, dans le rivage, pour les étouffer et ainsi taire leurs avertissements. Les Troyens voient dans la mort de Laocoon un message des dieux : le cheval est une offrande des Grecs aux dieux et, de ce fait, il doivent l’accepter et le faire entrer dans la ville.
La suite de cette histoire est tristement célèbre : le cheval de bois est rentré à l’intérieur des murailles de Troie. En son sein sont dissimulés l’élite des guerriers grecs, menés par Ulysse. Le soir, les soldats sortent de leur cachette et mettent la ville à feu et à sang, gagnant ainsi la longue guerre de Troie.
Que nous présente l’artiste ?
Dans ce groupe sculpté, l’artiste nous présente le point culminant de la scène, les serpents se saisissant du prêtre et de ses enfants. Cela lui permet de donner aux corps des positions très dynamiques et ainsi mettre en avant leurs et mettre en exergue le pathos de cette famille emportée dans les profondeurs de l’Océan.
Le groupe du Laocoon, une découverte majeure de la Renaissance
Le groupe du Laocoon est mis au jour sur la colline de l’Esquilin, à Rome, le 14 janvier 1506. Le site de découverte se situe à proximité de l’ancienne domus aurea, le palais de Néron. Cette redécouverte a eu un grand écho dans le monde intellectuel de l’époque et, on raconte même que plusieurs artistes, dont Michel Ange, ont assisté à la mise au jour.
Rapidement, l’oeuvre est identifiée comme l’une des sculptures évoquées par Pline dans ses textes : « (…) le Laocoon qui se trouve dans la demeure de l’empereur Titus, qu’il faut préférer à toute la peinture et toute la sculpture. D’un seul bloc de pierre, les grands artistes Agésandros, Polydoros et Athénodoros de Rhodes réalisèrent Laocoon, ses fils et des nœuds de serpents magnifiques, grâce à l’accord de leur idée. » Le groupe sculpté acquiert donc une grande renommée et rejoint les collection papales après un achat par le pape Jules II le 26 mars 1506. Suite à cette découvert débute une longue série de recherches d’antiquités sur le sol italien par des humanistes et des érudits. Ainsi tous ces éléments nous montrent que l’oeuvre a considérablement influencé l’art de cette époque mais également les artistes postérieurs puisque, depuis sa découverte, elle a voyagé dans toute l’Europe. Ainsi, de nombreuses copies de l’oeuvre ont été réalisées et son étude a permis aux artistes de voir une nouvelle manière de travailler le modelé de la chaire.
Les représentations du Laocoon dans l’histoire de l’art
Comme nous l’avons indiqué plus haut, Le Laocoon a inspiré de nombreux artistes depuis sa découverte mais la représentation de cette scène n’est pas inconnu avant ce groupe sculpté. Voici donc quelques exemples de ces œuvres.

BONUS POP-CULTURE
L’épisode de la découverte du Laocoon apparaît dans un épisode de la Série Borgia !
Bibliographie
Ouvrages de référence
- Homère, L’Odyssée.
- Virgile, L’Enéide.
Ouvrages généraux
- DARTHOU Sonia, Lexique des symboles de la mythologie grecque, Que sais-je ?, 2017.
- HAMILTON Edith, La mythologie, Ses dieux, ses héros, ses légendes, Poche Marabout, 2013.
- RAT Maurice, Aide-mémoire de Grec, Nathan, 2008.
Webographie
- Article par DEMOULES Jean-Paul dans Universalis : https://www.universalis.fr/encyclopedie/laocoon-sculpture/